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d’apprécier
ses shikiri-naoshi et que ce droit n’a pas à être
contesté par les shinjinrui. Bien entendu, la notion selon
laquelle les étrangers n’ont pas à influencer les natifs
a toujours sous-tendu le Japon depuis des siècles. Mais le sumo
du 21ème siècle devrait voir cette conception avec
inquiétude. Kentaro, Yu et beaucoup d’autres de leurs
contemporains sous-entendent souvent que l’accroissement de leur
intérêt pour le sumo ne peut se faire seulement si le
plaisir de leurs anciens à contempler ce spectacle est
préservé, et qu’ils se résigneraient plutôt
à détester le sumo que de risquer de s’opposer à
leurs aînés. Le sumo ne verra jamais venir à lui
des hordes de jeunes admirateurs tant que ce sentiment perdurera. Le sumo doit plutôt démontrer aux shinjinrui que leurs intérêts ne sont pas à l’opposé de ceux des fans les plus âgés, et doit faire comprendre que le shikiri-naoshi offre quelque chose à tous. Tandis que les fans âgés en apprécient chacun des aspects, les jeunes sont particulièrement impressionnés par les expressions sur les visages des lutteurs quand ils s’affrontent du regard. Les plus vieux peuvent détester le regard menaçant d’Asashoryu dans sa préparation d’avant combat, mais les plus jeunes vont le trouver intriguant et amusant. Ils feront tout un brouhaha lorsque les lutteurs se frappent sur tout le corps et seront curieux de savoir quelle proportion de cette force pourra être employée face à l’adversaire. Ils mourront d'envie de savoir ce que les lutteurs auraient envie de se dire, s’ils en avaient l’autorisation à la manière d’une conférence de presse du K1. Bref, il faudrait minimiser l’aspect religieux à l’égard des shinjinrui, au profit d’une mise en valeur de la tension et de la guerre mentale. Il est hors de question de raccourcir de quelque manière que ce soit le shikiri-naoshi. Les fans les plus anciens réagissent déjà avec colère quand les |
retransmissions de la NHK substituent au shikiri-naoshi des reportages et des interviews. En Occident toutefois, le sumo doit adapter ses rituels au type de public qu’il veut attirer. S’il cherche l’adhésion de ceux qui sont attirés par tout ce qui est oriental, un shikiri-naoshi de quatre minutes est parfait. Si, d’un autre côté, il cherche à gagner les cœurs de ceux qui sont purement intéressés par le combat, un rituel raccourci est fortement conseillé. Le shikiri-naoshi en version intégrale a remporté un franc succès devant les 11.000 spectateurs du Royal Albert Hall, dont la plupart avait connu le sumo en suivant les retransmissions de Channel Four. Le succès a été identique face à la majorité des supporters du Grand Sumo de Las Vegas en 2005. A l’inverse, quand la fédération américaine du World Wrestling Entertainment a eu l’ambition de mettre en scène un combat de sumo impliquant Akebono devant 20.000 fans de lutte pro avides d’étranglements et de soumissions, même une minute de jeter de sel a fait l’objet de risées. En revanche, un public avec un état d’esprit analogue, venu pour voir le US Sumo Open de 2006 a été agréablement surpris de constater que le sumo amateur ne demande à ses combattants que d’à peine plier les genoux et de frapper leurs mains avant de lutter. Tant que certains éléments du rituel demeurent – même s’ils ne sont qu’en filigrane – le sumo peut à la fois respecter la tradition tout en trouvant des fans dans de nouveaux territoires. La concurrence du K1 L’entreprise de réhabilitation du sumo vis à vis des jeunes a été véritablement rendue plus difficile le 31 décembre 2003. En cette nuit de la Saint Sylvestre, pratiquement la moitié du Japon a vu un ancien yokozuna, Akebono Taro, se faire matraquer par Bob Sapp lors d’un |
combat de K1. Il est impossible de sous-estimer l’impact de la chute douloureuse d’Akebono sur les impressionnables shinjinrui japonais. Sapp est devenu un personnage culte à leurs yeux après avoir prêté sa personnalité charismatique pour une série de pubs télévisées. On le voit comme un symbole de la modernisation, tandis que l’histoire d’Akebono le range au côté des forces de la tradition. Les shinjinrui y ont vu non seulement une victoire de la modernité, mais aussi un combattant somme toute moyen de K1 battre un yokozuna, le symbole de l’invincibilité du sumo. Leurs doutes sur le fait que les sumotori ne soient plus les plus forts guerriers du Japon en ont été spectaculairement renforcés, tandis que le yokozuna dohyo-iri – dont le but est de dépeindre le yokozuna comme une personnification incarnée de la magnificence – est menacé de n’être vu que comme un petit moment de bravache. Kenji, le petit jeune enrobé de Tokyo, parle pour la plupart de ses pairs quand il dit : « Je n’aime pas Akebono comme combattant. Il est seulement lourd. Aucune force. Aucune technique non plus ». D’autres adolescents rient simplement quand ils entendent les mots de « Akebono » et « K1 » dans la même phrase. Michiko, la jeune femme de Toyama, essaie gentiment de défendre le rang de yokozuna à la lumière de la chute de Akebono. « Un yokozuna est juste… Dieu ! » s’exclame-t-elle. « [mais] on a regardé le combat de K1 et il n’était plus un yokozuna. Je ne peux avoir de respect pour cela ». Elle implique que si Akebono – ou en fait n’importe quel yokozuna – avait combattu Bob Sapp comme un yokozuna, il l’aurait emporté. Il est vrai que lorsque Akebono a affronté Bob Sapp, il n’était pas au mieux de sa forme. Mais malheureusement Suite |
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