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Asashoryu
n’atteigne des sommets inégalés, remportant sept tournois
consécutifs et battant le record du nombre de combats
remportés dans une annéecalendaire (84/90). Avec les
meilleurs lutteurs japonais qui n’offrent qu’une résistance
médiocre, les shinjinrui se sont trouvé une nouvelle
excuse pour décrier le sumo, avec des commentaires tels que
celui de Keisuke, 24 ans : « C’est ennuyeux maintenant. Il n’y a
pas de yokozuna japonais et les ozeki ne valent rien ». D’autres
jeunes, comme Kentaro, 25 ans, mettent un côté
étonnamment cocardier dans leurs commentaires : « Ce n’est
absolument pas un commentaire raciste, mais c’est une grande honte pour
notre sport national, notre sport traditionnel, de ne pas avoir de
yokozuna japonais. Au fond de nous-mêmes, nous ressentons le
besoin de dominer notre sport national ». La journaliste de sumo Michiyo Ishida est conscient que le sumo a besoin d’un héros local pour raviver le soutien de toutes les tranches d’âge : « Jusqu’à ce que Wakanohana et Takanohana se sont retirés [en 2001 et 2003], le sumo bénéficiait d’une large audience dans toutes les tranches d’âge. Aujourd’hui nous n’avons plus de superstars comme Taka et Waka, donc le public a perdu son intérêt pour ce sport ». En janvier 2006, l’ozeki japonais Tochiazuma a donné de la consistance aux remarques de Ishida en combattant comme un yokozuna et en attirant ainsi des foules de spectateurs au Kokugikan. Toutefois, l’analyse d’Ishida est |
remise
en cause par maints shinjinrui pour qui la popularité du sumo
déclinait déjà bien avant l’intai de Taka et Waka.
L’analyse ne parvient pas non plus à expliquer la brève
remontée de popularité quand un lutteur non-Japonais,
Kotooshu, parvint à deux doigts de remporter le yusho en
septembre 2005. En conséquence, et en l’absence de candidat japonais crédible à la tsuna, certains observateurs pensent que le sumo ne doit pas chercher désespérément un yokozuna japonais, mais plus simplement des personnalités qui incarnent l’excellence. Pour reprendre les mots de Fujimori : « Le sumo est un spectacle, et le plus important est qu’il doit tourner autour de combattants qui ont une personnalité – tous étant surpuissants – et suffisamment de charisme pour mobiliser l’intérêt du public. Il n’est pas absolument nécessaire que ces combattants soient yokozuna, mais ils doivent inspirer le respect et combattre avec intensité ». Elle est loin d’être la seule à penser que le sumo actuel est parfois terni par le combat défensif, qui est considéré comme ennuyeux même par les fans les plus accrochés. Cette vision des choses implique qu’un rikishi doit imposer le respect en avançant et en attaquant, sans craindre le résultat, et qu’on doit recentrer le débat sur les sujets abordés au premier numéro de cette étude. Des personnalités agressives et sans peurs sur le dohyo ne peuvent se |
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façonner
qu’avec la plus extrême préparation physique et mentale au
sein des heya, selon le Dr Lyall Watson, qui maintient que : «
L’avenir du sumo dépend entièrement d’un retour au sumo
classique. Ce qu’il nous faut est un nouvel âge d’or, avec des
entraîneurs et des lutteurs qui en reviennent aux principes
fondamentaux, et des rikishi qui soient à fond dans leur art
». A une époque où les shinjinrui demandent
explicitement à ce que le sumo se modernise, une
réaffirmation des valeurs traditionnelles semble un pari
risqué. Si le sumo doit adopter cette stratégie, il devra
trouver un équilibre entre ce retour vers le passé et les
initiatives de modernisation évoquées dans les autres
sujets. En ce moment, le sumo souffre indiscutablement d’un gouffre
majeur entre ses valeurs et celles des shinjinrui. A la poursuite
d’objectifs totalement opposés, la NSK et les shinjinrui ont des
conceptions aux antipodes. Plus ils resteront sans se poser de
questions, plus le sumo y perdra. Ayant brièvement exploré les barrières psychologiques et émotionnelles que les shinjinrui rencontrent pour aimer le sumo, nous nous tournerons vers les barrières structurelles dans la dernière partie de notre étude. Nous verrons si les tickets ne sont pas trop chers et difficiles à acheter, si les tournois se tiennent dans des villes trop peu nombreuses, si le système des jungyo a besoin d’être réformé, et si la NSK devrait plus s’impliquer dans le sumo amateur.
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